Depuis le début de l’année 2025, l’intelligence artificielle CLARITY a été déployée pour accompagner les patients dans leurs premiers échanges médicaux. Cette technologie peut interroger un patient, noter ses symptômes et proposer un chemin vers un spécialiste. À première vue, cette invention paraît prodigieuse : elle promet rapidité et efficacité, et peut-être même un accès plus large aux soins.
Et pourtant, il est difficile de ne pas réfléchir aux utilisateurs, aux patients qui lui parlent, et à ce qu’il advient de la relation si précieuse entre le médecin et celui qu’il soigne. Car il est une chose que l’on ne saurait déléguer à une intelligence artificielle : la responsabilité, la vigilance et le jugement moral. Si l’IA se trompe, qui en porte la faute ? Le créateur, le médecin, ou le patient lui-même, pris au piège d’un système qu’il ne comprend pas ? Et l’on pourrait ajouter que les données elles-mêmes, comme un miroir de nos sociétés, peuvent transmettre nos inégalités et nos préjugés, sans que personne n’en soit pleinement conscient. Il ne faut pas méconnaître ce que la médecine est réellement : un acte humain, une attention portée à l’autre, une écoute attentive de la fragilité et de la souffrance.
Les intelligences artificielles, aussi sophistiquées soient-elles, ne peuvent ressentir ni juger, et la consultation automatisée risque de réduire le patient à une simple série d’informations à analyser. Pourtant, ces inventions ne doivent pas être condamnées. Elles peuvent aider, soutenir, organiser, et donner aux médecins le temps de mieux écouter, mieux comprendre. Mais réfléchir à leur usage, anticiper les dérives et poser des limites éthiques apparaît essentiel.
Car une médecine qui perdrait son humanité ne serait plus digne de ce nom. Ainsi CLARITY, comme toute technologie, oblige à penser, à s’interroger, et à se rappeler que le soin véritable n’est jamais une technique, mais une rencontre, un choix, un engagement envers l’autre.
Tony Djokic