Dans toutes les cultures, toutes les religions, de tout temps, on se souhaite la paix. On la souhaite même aux morts, indice que le défunt ne l’aurait peut-être pas connue de son vivant, et la mérite enfin, et que les survivants aimeraient bien aussi la connaître, avant cet instant définitif.
Que se souhaite-t-on en invoquant la paix ? Un apaisement durable qui conduirait à la sérénité, au bien-être, à l’harmonie des relations avec les autres et le monde, à la complétude en un mot.
Un apaisement de quoi ? De toutes les tensions créées par des situations et des relations où s’installent durablement de la méfiance, de la frustration, des conflits, de la peur, de la colère, voire de la haine. Y compris les relations avec soi-même. La culpabilité, l’anxiété, la haine de soi sont des constructions internes.
C’est un souhait d’adulte. Les enfants ne se souhaitent pas la paix. Les enfants, en général, n’anticipent pas les problèmes, vivent d’abord l’instant présent, ne restent pas dans la rumination, le ressentiment, expriment d’abord leur vitalité, sont dans l’action, plutôt dans la coopération et les conflits se résolvent assez vite.
Souhaiter la paix à l’autre c’est aussi se la souhaiter. « Va en paix » appelle que l’autre réponde de même à notre égard. C’est donc souhaiter que l’un et l’autre retrouvions notre humanité profonde, notre humanité fraternelle qui doit l’emporter sur le reste et nous libérer des conflits qui nous détruisent. Mais souhaiter la paix n’est pas refuser le conflit. C’est reconnaitre qu’il y a un objet de conflit et vouloir qu’émerge une solution qui ne passe pas par la violence.
Mais la paix est un combat, il faut la défendre. La paix en Soi, la paix entre-soi. Elle est menacée chaque fois que prétend s’imposer, prétend avoir priorité autre chose que le respect que l’on doit à soi- même comme à chacun, chaque fois que notre dignité et celle de l’autre passent en second, chaque fois que nous mettons notre puissance au service d’autre chose que l’harmonie de nos relations.
Patrick Margron
